Prison de Baie-Mahault : Lettre ouverte au Garde des Sceaux, Ministre de la Justice

Baie-Mahault, le 17 Mai 2023

Le syndicat Force Ouvrière Justice

CP de Baie-Mahault

A

Monsieur le Garde des Sceaux,

Ministre de la Justice

 

Objet : votre visite au Centre Pénitentiaire de Baie-Mahault.

Monsieur le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice,

Le syndicat Force Ouvrière Justice vous souhaite la bienvenue dans notre Etablissement vieillissant mais que nous aimons. Une prison que nous avons appris à aimer car nous passons la majeure partie de notre temps à l’intérieur de ses murs ; murs que notre chère Direction a bien voulu faire paraître beaux pour votre venue. Mais il ne suffit pas d’un coup de peinture pour masquer et balayer toute la détresse qui y règne (comme si tout allait bien).

Ainsi donc, nous profitons de votre passage en ces lieux, pour vous soumettre les doléances légitimes des personnels sous votre autorité.

Dans un premier temps, nous tenons à vous interpeller sur une question épineuse : celle des ressources humaines. Contrairement aux données erronées de notre Organigramme de Référence, le Centre Pénitentiaire de Baie-Mahault souffre d’un manque cruel en personnel. Beaucoup de postes ont été ouvert sans apport supplémentaire en effectif, ce qui a fragilisé le nombre d’Agents par équipe.

Par ailleurs, le personnel est vieillissant (une moyenne d’âge de 50 ans) et nous n’avons ni Surveillants Stagiaires ni Elèves Surveillants pour nous épauler dans nos missions comme dans l’Hexagone. Monsieur le Ministre, il n’est pas normal que certains Agents doublent, voire triplent les nuits même s’ils sont volontaires. Il n’est pas normal que le service des agents nous impose un service Matin/soir (12 heures) juste avant un Matin/Nuit.

Le résultat de ce manque d’effectif est alarmant ! Le rythme de travail des Agents est trop soutenu ! Cela entraîne fatigue physique et morale mais aussi absentéisme. A l’heure où l’on parle, nous faisons face à beaucoup de souffrance au travail. Cette situation ne peut plus durer. Monsieur le Ministre, vous n’êtes pas sans savoir que depuis quelques années que le Centre Pénitentiaire a perdu bon nombre de collègues dans des circonstances douloureuses et dont les stigmates sont encore présents.

Monsieur le Ministre, renvoyez nos frères et sœurs à la maison. L’Etablissement a besoin d’eux, ils nous seront d’un grand secours. A défaut, vous serez le témoin d’une mort à petit feu de l’ensemble du personnel. Alors, Monsieur le Ministre, n’attendez pas le DAC pour faire venir sur l’Etablissement des bras encore valides et volontaires.

Autre sujet tout aussi important, la sécurité. FO Justice Bémao réclame un renforcement de la sécurité périmétrique. Car les abords du Centre Pénitentiaire sont devenus, de jour comme de nuit, un centre de villégiatures pour les livreurs de toutes sortes de projections. Nous menons un combat acharné et sans répits contre ces projections. Et depuis peu, les drones se sont invités au bal des livraisons, rendant notre tâche encore plus ardue. Il faudra à court terme prévoir un brouilleur d’onde pour ces drones. Les caillebotis placés dans certains quartiers ont été détériorés par les détenus et ne nous aident pas contre le ramassage des objets balancés depuis l’extérieur. La construction d’une volière a été demandé à la DSPOM mais c’est le silence total. Il est à noter que cette volière a fait ses preuves au Centre Pénitentiaire de Ducos.

Pour un Etablissement Pénitentiaire français, nous ne disposons pas des mêmes moyens que ceux de l’Hexagone. Monsieur le Ministre, Force Ouvrière Justice déplore l’absence sur notre territoire, de structures types UHSI – UHSA – PREJ. Notre organisation syndicale, force de proposition, vous propose la création d’une entité qui engloberait les extractions médicales et judiciaires, la sécurité intérieure et extérieure ainsi que le maintien de l’ordre. La Guadeloupe pouvant servir de site pilote pour les autres territoires ultramarins.

L’une des principales préoccupations du Centre Pénitentiaire est la lutte contre la violence. Violence à l’encontre du personnel, mais aussi la violence entre personnes détenues. Occuper les détenus devrait être un des mayens de lutte. Malheureusement, le travail pénal est quasiment inexistant. Les personnes détenues sont trop oisives. Et parallèlement, il faudra mettre en place une vraie politique de réinsertion car plus de 60 % des mises sous écrou sont des personnes en récidive.

Pour finir nous évoquerons le fameux DAC, ce dispositif d’accroissement qui nous a été imposé par l’APIJ et la DSPOM, sans aucunes concertations avec le personnel. Certes, deux présentations nous ont été faites. Mais, malgré nos diverses interrogations et nos inquiétudes, aucunes améliorations n’ont été apportées au projet.

Qui dit agrandissement dit des centaines de détenus en plus et près d’une centaine de Surveillants. Nous devons porter une réelle réflexion sur les services transversaux (la cuisine, le greffe, la buanderie, le magasin, le vestiaire des détenus, le vestiaire des Surveillants, les locaux de détente en service de nuit, le parloir, les locaux administratifs…) qui seront trop petits. Mais aussi la révision des effectifs en personnel administratif, CPIP et technique. Ce n’est surement pas lors de l’ouverture de ce DAC qu’il faudra se poser ces questions.

Nombre de petits problèmes persistent encore au sein de notre Etablissement, des problèmes qui relèvent de l’ordre du local et qui, nous l’espérons, se règleront très vite.

Dans l’espoir que nos doléances trouveront écho auprès de vos services, le syndicat Force Ouvrière Justice Bémao vous prie d’accepter, Monsieur le Ministre, nos salutations respectueuses.

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