Personnes présentes :
– pour la visite du SPIP : Madame Odette JEZEQUEL, responsable régionale FO en charge des PIP, Monsieur David PEREIRA, régional FO en charge des PA.
– pour la visite du CP : Monsieur Didier KANDASSAMY, régional adjoint FO en charge des PS, accompagné des secrétaires locaux Andy NOEL, Dimitri JEAN, CLEMENT, et Delphine NADEAU.
– CPIP représentatifs du service (QA, divisions, jeunes professionnels et plus anciens)
– Madame POYET, responsable de l’antenne du milieu fermé (MF)
1. Contexte et objectifs de la visite
La visite a été réalisée pour évaluer l’état actuel du SPIP et donc du suivi des détenus au Centre Pénitentiaire de Fresnes, dans un contexte de surcharge de travail pour les Conseillers Pénitentiaires d’Insertion et de Probation (CPIP) et de difficultés organisationnelles. Cette visite avait également pour but de prendre en compte les problématiques de conditions de travail du personnel SPIP, d’échanger autour de la gestion des dossiers des détenus, et de discuter des perspectives de gestion des flux de détenus dans un contexte de désencombrement des établissements pénitentiaires d’Île-de-France.
2. État actuel du quartier des arrivants
Le quartier des arrivants du Centre Pénitentiaire de Fresnes est actuellement sous forte pression en raison du désencombrement des établissements pénitentiaires d’Île-de-France. Un exemple marquant de cette situation a été l’arrivée de 31 détenus le 13 décembre 2024, qui ont été pris en charge dans des conditions difficiles. En effet la plupart de ces détenus étaient libérés dans un délai de 2 à 3 semaines. Cette situation met une pression considérable sur le personnel, notamment les CPIP, qui doivent gérer ces arrivées multiples dans des délais très courts.
Actuellement, le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation du Centre Pénitentiaire de Fresnes dispose, pour le QA de 8 CPIP sur l’organigramme (7 ETP) dont un stagiaire et une contractuelle qui quittera son poste en février 2025. La charge de travail des CPIP est en constante augmentation, avec un nombre de dossiers et de détenus à prendre en charge qui dépasse les capacités humaines disponibles.
3. Organisation du travail et charge de travail des CPIP
3.1. Exemple de la première division
Les CPIP affectés à la première division, chargée des détenus condamnés à des peines de courte durée, doivent gérer moins de dossiers que leurs collègues affectés à d’autres divisions, car ils font face à des situations particulières, avec des détenus dont la prise en charge doit être rapide. Chaque CPIP a en moyenne 40 à 50 dossiers à gérer pour environ 10 prévenus.
3.2. Charge de travail et organisation
Actuellement, les CPIP sont au nombre de 4,7 équivalents temps plein dans la première division, ce qui est insuffisant pour répondre à la demande. Les commissions d’application des peines (CAP) sont particulièrement chargées, avec environ 60 dossiers étudiés lors de chaque session, ce qui alourdit la charge de travail pour chaque CPIP.
En 2023, la gestion des dossiers était plus stable, avec une charge de 60 à 70 détenus par CPIP, contre 87 à 89 détenus par CPIP en 2024. Certains CPIP gèrent même jusqu’à 90 dossiers dans certaines divisions, créant un climat de frustration et un sentiment de perte de sens du métier. Cette surcharge de travail est source de stress et d’insatisfaction parmi les CPIP, qui ont exprimé leur frustration face à l’absence de renforts lors de la dernière campagne de mobilité, tandis que d’autres services, comme le SPIP de Créteil, ont reçu des renforts importants (10 CPIP).
3.3. Conditions de travail
Les CPIP font des journées de travail longues, souvent de 9h00 par jour, et sont régulièrement contraints de faire des heures supplémentaires pour respecter les échéances judiciaires. Cependant, ces heures supplémentaires sont souvent « écrêtées », ce qui contribue à un malaise général parmi les CPIP, qui ne se sentent pas soutenus dans leur travail.
4. Problèmes rencontrés par les CPIP
Les principales difficultés rencontrées par les CPIP sont les suivantes :
• Surcharge de travail : La gestion d’un grand nombre de dossiers dans des délais serrés empêche la réalisation d’un travail de qualité. Les CPIP se sentent contraints de faire de l’abattage plutôt qu’un travail d’accompagnement personnalisé et qualitatif.
• Manque de visibilité : Les CPIP n’ont aucune visibilité sur l’avenir, ce qui crée une incertitude constante sur la gestion de leurs missions.
• Manque de soutien : Il y a un sentiment de ne pas être entendus par la DFPIP, ce qui exacerbe la frustration des agents.
• Conditions de travail difficiles : La charge de travail est lourde et le personnel administratif est insuffisant (3 personnes pour tout le centre pénitentiaire), ce qui aggrave les conditions de travail des CPIP.
5. Partenariats extérieurs et problèmes rencontrés
Le partenariat avec les acteurs extérieurs, tels que le Point d’Accès aux Droits, est relativement bien établi. Cependant, plusieurs difficultés sont à signaler :
• Turnover au Point d’Accès aux Droits : Ce manque de stabilité dans le partenariat nuit à l’efficacité du suivi des détenus.
• Réponse insuffisante de la Préfecture : La Préfecture ne répond pas aux sollicitations des CPIP concernant les démarches administratives des détenus.
• Problèmes d’accès aux détenus : Les CPIP rencontrent des difficultés pour voir rapidement les détenus en entretien, ce qui complique la gestion de leurs dossiers.
6. Rencontre avec Mme POYET, responsable de l’antenne SPIP du MF
Madame POYET s’est exprimée sur les conditions de travail de l’équipe du SPIP, soulignant que l’année 2023 avait été relativement acceptable, avec une bonne dynamique et des programmes d’action collective ; mais reconnaît que 2024 a été beaucoup plus compliqué. Elle a également indiqué que, en raison de la surcharge de travail, elle ne pouvait pas répondre favorablement aux demandes de mutation internes. S’agissant de l’équipe des cadres, une DPIP est affectée sur le QSL et trois autres DPIP pour tout le centre pénitentiaire. Mme POYET nous a précisé, qu’elle ne s’était pas vue alloué la gestion de secteurs en plus de son activité de responsable d’antenne.
7. Conclusion et recommandations
Les CPIP du Centre Pénitentiaire de Fresnes sont actuellement dans une situation de surcharge de travail avec des conditions professionnelles très difficiles. Les délais serrés et la gestion de plus de 80 dossiers par CPIP ne permettent pas d’assurer un suivi de qualité, ce qui est source de frustration et de démotivation pour le personnel.
FO Justice exige :
• Le renfort des effectifs : Il est impératif de respecter les effectifs de référence et d’allouer davantage de ressources humaines pour réduire la surcharge de travail des CPIP.
• La fin de l’écrêtage des heures supplémentaires : toures les heures de travail doivent être prises en compte et comptabilisées.
FO Justice souhaite :
• L’amélioration et la stabilité de la coopération avec les partenaires externes : Une attention particulière doit être portée à la stabilité des partenariats externes et à l’amélioration des réponses administratives, notamment avec la Préfecture.
Il est essentiel qu’une prise de conscience sur les risques psycho-sociaux soit menée, car la charge actuelle met en péril la santé mentale et la qualité du travail des CPIP.
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